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"Ces monstres qui parfois dorment en nous..."


"Entre la rue et le placard, nous avons choisi le placard !", voilà qui résume la situation de Juliette et Guy, contraint de se vendre pour pouvoir vivre. Eh oui, les temps sont durs et ont changé. On trouve aujourd'hui facilement des êtres humains en vente en magasin, disons des "amis à vendre", et Juliette et Guy ont du se résoudre à se mettre en rayon. C'est les soldes... Banco ! Jacques et Odile s'offrent un couple d'amis pour meubler leurs soirées, ce sera Juliette et Guy. La pièce démarre à ce moment-là, Didier Bénureau (Jacques) et Romane Bohringer (Odile) s'avançant sur le proscénium pour nous parler de leur choix et des avantages d'avoir des amis disponibles dans un placard ! Là commence une incroyable farce qui, si elle reste sur une tonalité humoristique, devient vite cruelle, dépeignant avec justesse les rapports malsains issus de la soumission "subie/consentie".


Jacques et Odile, petits bourgeois de banlieue, équipés de cerveaux qui ont la légèreté des blancs en neige, s'ennuient ferme et s'imaginent que des amis pourront combler le vide sidéral qui les habite. Et à une époque où on achète tout, l'achat d'amis peut être un bon investissement... Mais les soirées se suivent et le "Qu'allons nous faire ce soir, chers amis, une conversation littéraire ou improviser une dispute entre amis ?" s'use, faisant glisser vers le toujours plus glauque les challenges auxquels doivent répondre Juliette et Guy en sortant de leur inconfortable placard. L'horreur s'installe petit à petit, subrepticement. Les répliques s'alignent comme des poignards et la tension s'installe. Les amis du placard finiront-ils au pilon, sentence ultime promis aux "marchandises" récalcitrantes ? Bien sûr, tout ceci n'est que du théâtre et l'humour (acide certes) habille judicieusement l'ensemble.


Gabor Rassov a un talent (d'auteur) particulier pour rendre dicible l'horreur des situations insupportables. Celles-ci paraissent au début banales, presque joviales et amusantes puis subtilement se dégrade, plongeant doucement vers l'épouvante. Ici pas de gore au 1er degré... mais plutôt au 2e/3e degré car cela se passe dans les relations qui du grotesque confinent au nauséabond, se réfugiant dans les pires travers de l'âme humaine : l'exploitation de l'homme par l'homme (et c'est en cela que ce texte est intelligent et insidieusement politique). L'association (qui dure depuis 1986) avec Pierre Pradinas à la mise en scène prend ici toute sa signification. Celle-ci, enlevé et rythmé, bourré d'idées et de petites surprises, maintient le spectacle dans la rubrique "comédie", naviguant de manière étonnante en désinvolture, presque légèreté et méchanceté... presque férocité.


Le tout est appuyé par un quatuor de comédiens choc ! Didier Bénureau met tout son immense talent d'interprète de "beauf répugnant et suffisant" (qu'il utilise dans ses sketches en solo) au service de son personnage. Il fait incontestablement partie de cette brochette saignante, mais talentueuse, de comédiens (Albert Dupontel, Michel Muller, Manuel Pratt) qui savent dire avec humour l'indicible.

Romane Bohringer utilise une palette d'interprétation (un vrai rôle de composition) assez étonnante allant de la potiche/femme soumise au petit soldat devenant petit piranha teigneux en passant par la bourgeoise frigide, finissant en cruche cynique.

Matthieu Rozé et Aliénor Marcadé-Séchan sont, eux aussi, convaincants, tout en finesse et en temporisation, gérant les pics dramatiques avec beaucoup de justesse. Ils apportent à leurs personnages l'équilibre parfait entre soumission et révolte...


Voilà un spectacle en tout point remarquable, où rarement toutes les composantes du théâtre - texte, mise en scène et distribution - auront été ainsi assemblées avec autant de réussite. Du Grand Guignol juste et moderne qui prouve que le duo Pradinas/Rassov est une des valeurs sûres du théâtre contemporain. Gil Chauveau

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"Les amis du placard"

(Vu le 21 septembre 2010)


Texte : Gabor Rassov.

Mise en scène : Pierre Pradinas.

Assistant à la mise en scène : Aurélien

Chaussade.

Avec : Didier Bénureau, Romane Bohringer,

Matthieu Rozé, Aliénor Marcadé-Séchan.


A partir du 7 septembre 2010.
Du mardi au samedi à 21 h et samedi à 16 h.
La Pépinière théâtre, Paris 2e, 01 42 61 44 16.

Nouvelle mise en scène de Pierre Pradinas que nous suivons avec toujours autant de plaisir depuis 1989. Après avoir créé la compagnie du Chapeau Rouge en 1978 à Avignon, il obtiendra avec celle-ci une résidence de près de dix ans au  théâtre La Piscine de Châtenay-Malabry. Depuis 2002, il dirige le Théâtre de l'Union, le Centre Dramatique National du Limousin. Pierre Pradinas met en scène pour la neuvième fois une pièce de Gabor Rassov. Ce dernier fut d'abord son assistant avant devenir auteur et comédien. Après traité des monstres historiques (Picrochole, Richard III, Néron) ou mythique (Satan) et les monstres de série B (Docteur Antonopoulos, le Baron Sadik, Fantômas) , il  s'attaque cette fois-ci aux monstres du quotidien. G.C.

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